Collégiale Saint Martin, Angers (49000), 2015

Les correspondances de Bernard Bouin

Du 7 mars au 10 Mai 2015

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A propos de ce lieu, je citerais cette phrase de Fernando Pessoa évoquant la cathédrale de Reims :

[...] Ce qu'il y a de vérité dans la cathédrale de Reims, ce n'est ni la cathédrale de Reims, ni la ville de Reims, mais la majesté religieuse des édifices voués à la connaissance des profondeurs de l'âme humaine.

"Le livre de l'intranquillité" F. Pessoa - Christian Bourgois Editeur.

 

 […] L’humanité gémit, à demi écrasée sous le poids des progrès qu’elle a faits. Elle ne sait pas assez que son avenir dépend d’elle. A elle de voir d’abord si elle veut continuer à vivre. A elle de se demander ensuite si elle veut vivre seulement, ou fournir en outre l’effort nécessaire pour que s’accomplisse, jusque sur notre planète réfractaire, la fonction essentielle de l’univers, qui est une machine à faire des dieux.

Henri Bergson - Les Deux Sources de la morale et de la religion - 1932

 

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent
II est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens

Poème de Charles Baudelaire (1857) - Les Fleurs du mal.

Ce poème de Charles Baudelaire « Correspondance », est le titre de cette exposition organisée dans le cadre du « Printemps des Poètes 2015 » à la Collégiale.

Ce lieu, hors du temps et dans le temps, m’amène à interroger ici sur l’Eternité autour du Polyptyque de l’église de la Pommeraye (situé à 30 kms d’Angers) dont on pourra voir ici les maquettes et trois autres ensembles présentés ici et créés en 1994, 2005 et 2013. A la suite d’une commande qui m’avait été faite, j’ai réalisé en 1997 pour le Chœur de l’église de mon village natal La Pommeraye, un Polyptyque de 8 peintures représentant les scènes de la vie du Christ. Tout en restant fidèle à mon style ainsi qu'à mes thématiques, j’avais voulu retrouver l'esprit de certains de mes maîtres Masaccio, Piero Della Francesca…

Vous pourrez voir les quatre études 65 x 81 cm dessin sur toile de l'ensemble « Les Saisons » réalisé en 1994, et le poème de Loïs Langland écrit en 1996.

Les peintures « Miroir - Les Saisons 2005 », ensemble de quatre diptyques réalisé en 2005 est associé ici à des extraits du poème du « Lac » de Lamartine.

Et « Ainsi parlait Zarathoustra » ensemble de quatorze peintures réalisé en 2013 d’après l’œuvre de Friedrich Nietzsche.

Patmos – Poème de Friedrich Hölderlin (1808)

Tout proche
Et difficile à saisir, le dieu !
Mais aux lieux du péril croît
Aussi ce qui sauve.
Dans la ténèbre
Nichent les aigles et sans frémir
Les fils des Alpes sur des ponts légers
Passent l’abîme.
Ainsi puisque autour de nous s’amoncellent,dressées,
Les montagnes du Temps,
Et que les bien-aimés vivent là tout proches, languissant
De solitude sur les cimes séparées,
Ah ! fais-nous don des ailes, que nous passions là-bas, coeurs
Fidèles, et fassions ici retour !

Extrait – Traduction Gustave Roud

 

 

 

 

J’ai souhaité reproduire ici le début du très beau Poème « Patmos » du poète allemand Friedrich Hölderlin.

Pour lui, le poète peut donner valeur divine et forme mythique aux forces de la nature.
Dionysos est le dieu le plus souvent invoqué, mais le Christ apparaît aussi.

Le couchant doré (81 x 100 cm)

Poème d'Arthur Rimbaud (1873)

Couverture-copie

Explication du poème

Par Philippe Sollers - Mai 2008 (Discours Parfait, Folio n°5344, page 683 - Extrait)

« Quand je prends l’autobus, je me récite : « Mon âme éternelle/observe ton voeu/malgré la nuit seule/et le jour en feu…».
Rimbaud a fait quelques corrections très intéressantes, parce qu’il avait d’abord écrit « malgré la nuit nulle et le jour en feu »; cela pour enchaîner sur les vers suivants : « donc tu te dégages/des humains suffrages, des communs élans/tu voles selon ».

C’est bien de réciter ça dans le bus ! On peut commenter ces vers indéfiniment.
D’abord, qu’est-ce que cela signifie quelqu’un qui tutoie son âme ?…
« Observe », au deux sens du mot : regarde et accomplis… « Tu voles selon», ce « selon » est magnifique.
Qu’est-ce que ça veut dire ?
Je suis avec mon âme éternelle, je la tutoie, et j’observe en observant son voeu qu’elle vole selon.
Selon quoi ? Eh bien, selon ! à son gré, si vous préférez, à sa guise…
Alors vous retrouvez le début: « Elle est retrouvée, quoi ?/ L’éternité,/ C’est la mer mêlée au soleil.»
Il avait écrit d’abord « allée avec le soleil », et il a corrigé par « mêlée au soleil ».
Alors, qu’est-ce que vous constatez ?

Il est question de l’espace et du temps, des catégories fondamentales de l’existence, de ce sur quoi la pensée devrait s’interroger à chaque instant…

C’est la même expérience avec Parménide, Héraclite, Nietzsche, ou encore la Bible.

Nous pouvons faire comme si c’était de la littérature, pour ne dire finalement que des clichés, alors que nous sommes devant des propositions essentielles pour notre vie même, ici et maintenant, tous les jours ».

Informations pratiques

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Le polyptyque de Bernard Bouin par Marc Hérissé

ou l’esprit d’humilité des primitifs Italiens

« Dans ce grand polyptyque de huit panneaux, la lumière est la représentation de Dieu : qu’elle soit lumière dans la nuit (Annonciation), qu’elle soit la lumière de plein jour, union du ciel et de l’eau (Baptême*) ou Croix lumineuse d’un Golgotha au premières lueurs de l’aube (Résurrection): je ne saurais mieux m’exprimer sur cette œuvre importante, suivant au plus près les textes sacrés, que ne le fait Bouin lui-même en conclusion d’une suite de réflexions. Cette œuvre lumineuse n’a pas manqué de faire progresser cet artiste en quête constante.

Son polyptyque est en outre constellé de symboles. Et si la plupart sont délibérés, certains se sont développés à son insu. Pour cette grande peinture spectaculaire, l’artiste, en restant fidèle à son style ainsi qu’à ses thématiques, a retrouvé l’ esprit d’ humilité des primitifs italiens et flamands qui démultipliaient leur talent « pour mieux servir » et sans servilité.

[ Gazette Hôtel Drouot 9 Mai 1997 – Marc Hérissé ]
*Le Baptême est ici représenté dans la Loire qui coule à 3 kms à Montjean.

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