Les Natures Silencieuses

texte de Philippe Roy

Il est de tradition picturale en France de classer sous le genre de « natures mortes » une forme picturale. En ce qui me concerne je préfère le terme de « Natures silencieuses », traduction du mot allemand Stilleben ( nature calme, tranquille, silencieuse ) qui reflète mieux que notre vocable français l'esprit de cette peinture et l'impression que nous laissent les tableaux de Bernard Bouin : silence éloquent plein de mystère, lumière ressuscitant les objets, sérénité de la composition.

Renoncement et ascèse : ces mots viennent à l'esprit devant l'écart et le silence de l'œuvre de Bernard Bouin et son refus de se faire l'écho du bruit et le la fureur du monde. Ce sont là les exigences que s'impose le peintre pour pouvoir accueillir la résonance du souffle. Et c'est alors que, dans la tonalité du vide, dans le silence nimbé d'aurore, la forme et la couleur des choses viennent à la lumière. Car c'est du vide comblé par le pinceau que naît le forme. C'est de l'espace percé de lumière que naît notre regard.

C'est une vision qui se réalise dans l'acte de peindre. La beauté de sa peinture et sa simplicité, la révélation de l'objet, l'unité et l'identité réconciliées avec ce qui est, situent Bernard Bouin à l'écart de la violence de l'expression et des formes disloquées ou du traitement purement abstrait des matériaux. Il est exactement dans es marges de la modernité. Et non pas contre elle.
Il y a chez Bouin cet arrêt du temps et son résultat : le vide, le silence, l'absence de mouvement, les ombres figées d'une lumière qui ne connaît pas sa source.Ne demeurent dans ces tableaux que la vibration des couleurs à la lumière et le pouvoir spirituel et invisible de la réminiscence. Tout s'impose à nous avec l'évidence d'une rencontre nécessaire, où l'art est tout, c'est à dire cette puissance de suggestion, de révélation du rien. Cette peinture est d'une exemplaire nudité. Sentinelle de la banalité des jours, postée à la lisière du rien, elle ressasse une petite musique bien à elle, toute de fine mélancolie, et qui, le dernier regard porté, s'insinue en nous avec une dérangeante insistance….

[ Catalogue de l'exposition Musée Estrine Centre d'art Van Gogh Saint Rémy de Provence – Novembre 2002 ]

 

 

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