Nature(s) Silencieuse(s)
Peintre intimiste, Bernard Bouin plonge ses sujets dans le silence. Ses paysages de Venise, où il a séjourné récemment, sont des transpositions émotionnelles de sa contemplation. Ce ne sont pas les images, emblématiques de la Sérénissime qui le retiennent, mais une atmosphère particulière propre à la lagune et à son immensité. L’espace, ouvert aux jeux du crépuscule, suggère l’illusion. Le peintre ne retient que quelques détails : des pontons, la côte éloignée d’une des iles s’effaçant dans la brune, inscrivent une perspective dans un plan unique presque entièrement consacré aux vibrations nocturnes. Cette incertitude du lieu convient au peintre attentif à l’arrêt du temps. Le pouvoir de fascination qu’exerce sa peinture est toujours aussi efficace, qu’il s’agisse de personnages énigmatiques figés dans la lumière d’un réverbère, un thème qui traverse son oeuvre avec ses vues urbaines nocturnes, ses paysages diurnes soumis aux changements saisonniers de la lumière. Ici, la lumière incertaine, papillotante de touches légères, organise la toile et la rythme. La dimension réaliste du sujet croise la perception subjective de l’artiste.
Avec ses natures mortes, Bernard Bouin relie le passé au présent. La simplicité des objets – un pot en céramique blanche associé à des figues , à un citron, à des raisins ou une pastèque – est encore une fois un prétexte à exprimer ce qui ne se voit pas. Sa peinture est une méditation sur la part matérielle des choses et leur présence impalpable. Tout le travail de Bernard Bouin réside dans la subtilité d’un double espace temporel et spirituel. Cette simultanéité, filtrant le regard et la pensée, fait allusion à la métaphore du miroir.
Son talent est de nous faire partager l’illusion de la réalité transposée.
Lydai Harambourg – Gazette Hôtel Drouot – Octobre 2012
« La lumière de l’instant »
Dans ses œuvres, il capte la lumière de l’instant, qu’il s’agisse de paysages, de natures mortes ou de portraits. Il accapare l’essence de la journée, de la nuit et l’appose comme une partition musicale sur sa toile. Il développe une intériorité propice à l’abandon de chaque être. Quand les formes se cachent, la lumière surgit, le plein et le vide se succèdent. Chacune de ses œuvres est réalisée en plusieurs dynamiques sensorielles lumineuses : la lumière de l’instant.
Cette émergence lumineuse est l’élément fédérateur de ces compositions que notre regard identifie immédiatement dans un silence intérieur accordé à la simplicité des images. D’emblée elles s’imposent à nous comme des résurgences de formes connues. Dans l’opacité du visible s’est glissée l’évidence d’une plénitude. Face à la réalité objective, la lumière métamorphose, dans sa volonté de distance, l’apparence des choses, jusqu’à n’en garder que ses aspects sensoriels.
Lydia Harambourg, critique d’art, février 2003.
« Le temps suspendu »
« Le langage pictural de Bernard Bouin s’inscrit dans la lignée de peintres aussi éclectiques que Piero Della Francesca, Giotto, Poussin, Balthus et Hopper. Pourtant cette filiation n’est pas anodine puisque ces artistes ont dépassé la simple représentation réaliste des modèles et le la nature pour donné un sens caché à chaque tableau.
Bernard Bouin peint des scènes familières, reconnaissables au premier regard mais qui suscitent pourtant l’étrangeté. Une force d’attraction mystérieuse s’échappe de chacune de ses oeuvres pourtant si objectives
Eglantine Lebacq , attachée scientifique Musée des Beaux Arts de Mons ( Belgique)
J’ai rencontré pour la première fois Pierre Rosenberg au printemps 1995 au cours d’une exposition personnelle que je présentais à La Galerie Visconti. Il y était exposé ma première série sur les saisons réalisée dans l’esprit des « Quatre saisons » de Nicolas Poussin (Musée du Louvre). A cette époque, il était Président Directeur du Musée du Louvre et venait de faire une rétrospective sur Nicolas Poussin au Grand Palais à Paris.
La scénographie de l’exposition Chardin au Prado met en valeur la qualité de silence de cette peinture : un agencement de petites salles successives, une ambiance intimiste et les peintures présentées dans un accrochage assez aéré. Ainsi une toile sur un seul panneau lui donne une présence et une respiration remarquable.
A la fin de l’exposition j’ai eu le plaisir de voir, sur un même mur, trois natures mortes parmi celles que je préfère et dont j’ai les reproductions en permanence dans mon atelier. (voir photo ci dessous)
Après le vernissage, Pierre Rosenberg nous a demandé (Claudine m’accompagnait) ce que l’on pensait de l’accrochage. Il s’inquiétait aussi de l’accueil que ferait le public espagnol à cette très belle exposition….
Bien qu’elle traverse la nuit, la peinture de Bernard Bouin est une peinture de l’aube dans la mesure où elle est ce retour de confiante clarté où lentement reparaît ce qui avait été englouti.
Cette peinture est de celles qui s’abritent dans un mystère dont elle ne consent à livrer que des éclats feutrés, jamais les clés ».
[Philippe Roy – Octobre 2010]
L’exposition actuellement présentée à la Galerie de l’Europe sur l’œuvre de cet artiste et intitulée « Rivages » met l’accent sur des compositions situées en bord de mer.
Les paysages figurant des étendues marines vues de terre , une clôture délimitant ces deux zones distinctes, laissent une place importante au ciel peint dans des nuances variées et sont déclinés à toutes les heures du jour et de la nuit.
Du bleu pastel au bleu foncé des clartés fluorescentes s’inscrivent sur le tableau, mais cette luminosité a parfois des accents électriques et blafards rasant la surface du sol et donnant l’impression de se perdre dans l’immensité calme des eaux.
Rarement, des personnages occupent l’espace de la toile dans ce clair-obscur peu propice à l’agitation humaine, d’autres productions de ce créateur traduisent des moments plus précis de l’existence des êtres, évoquant parfois l’attente, le manque, la solitude, le bonheur ou même la mort.
Des sentiments complexes et subtils peuvent en effet naître à l’observation de ces images souvent troublantes par leur simplicité comme si le peintre cherchait à suggérer une présente immatérielle.
Dans le cadre de cet événement pictural, les tableaux de l’infini de l’océan qui rejoint la ligne d’horizon dans une atmosphère diurne ou nocturne permet de contempler le monde de tous les possibles enveloppé d’un certain mystère.
Il sous-tend toute vie consciente même s’il est dans ces images maritimes limité et coupé, traversé par ces palissades structurant l’ensemble qui démarquent en quelque sorte deux univers, l’un peut être visible et l’autre accessible par la réflexion ou
une pensée plus métaphysique.
Art Gazette international Octobre 2010.
Galerie de l’Europe
55 rue de Seine
Paris 75006